Carton traces

2013

Si les « cartons-traces » ne sont pas des vestiges préhistoriques, ce sont bien tout de même des fragments : mémoires d’un usage antérieur, d’une vie passée, mais en quelque sorte « pétrifiés » dans le bois. Fragiles en apparence, mais fragiles aussi dans leur réalité de sculptures, ils ont été souvent encadrés (plutôt qu’enfermés), protégés dans des boîtes de plexiglas qui ont conforté cette idée muséale de fragments retrouvés : ils sont là comme des tissus coptes, ou bien des éclats de poteries.
Ces cartons portent et présentent des traces : traces d’usage, traces d’accidents, de blessures (déchirures), d’enfoncements ; traces de violences, traces de pas, traces s’usure. Mais eux-mêmes sont aussi des traces, puisqu’ainsi on les collecte, les regarde, les scrute ; puisqu’on les rassemble, les recolle, les questionne.

Ce faisant, j’ai pris conscience d’une métaphore sous-jacente : c’est un peu l’archéologie de notre propre carnation qui est peut-être ici inscrite dans la matière, à l’état de trace. Un signe pathétique, ténu, murmuré, signe qu’on peut retrouver la trace, le chemin, la source ; la sensation primale, celle d’avant qu’elle soit dite ; celle du corps comme premier lieu.